21/09/2013

L' Etre en clown, le Nez


 Comme un poumon dans la paume. Je le presse comme une pompe, on ne sait jamais, des fois que ça aiderait la respiration, je souffle dans les trous du nez... Pom pom, pom pom. Un coeur, un organe, qu'est ce que je peux bien en faire avant de le mettre... comment se l'approprier cet objet, qu'y mettre dedans ? je sais pas moi. Le filament fin qui le tient se met à bouger au-dessus de la paume, je le maintiens tel un pendule, ça me fascine d'un coup, ce balancement. Un bon moment.
Mon nez-pendule est en train de t' hypnotiser...,hé, hé !


Première fois que je le pose en conscience sur mon nez, ce bout rouge. Jusque là tout va bien. Nous sommes déjà à moitié nu, il faut penser à se vêtir d'un de ces tissus qui jonche le sol.
Ah, se vêtir... qu'est-ce que c'est ça, se vêtir ?
Je/moi clowne part à la recherche de quelque chose. Une botte en lainage, par exemple, complètement dépouillé que j'enfile dans ma main droite. Why not ? La semelle s'en décolle par endroit, ce qui me fait un super gant de boxe. J'adopte. Je ris de ma trouvaille. Je ris de cette liberté folle de faire n' importe quoi et de m'habiller n'importe comment. Mais avec ce nez sur le pif, tu passes à la troisième personne, ce qui fait que ma foi, on sen fout pas mal du je, du moi. Suis plus moi, suis clowne qui fait bien ce qu'il veut. Je trouve là une manche, ici un pantalon, mais je ne sais pas trop à quoi ça sert en fait un futal donc il trainera à mon pied pendant toute la séance. J'éclate de rire tout le temps. Très jouissif grand portnawak. Je ne ressemble à rien de codifiable et ça me plait énormément. Ainsi parfaitement vêtu de morceaux de tissus, la moitié ne recouvrant que moyennement mon corps, je passe au maquillage.
Il m'est proprement impossible de réfléchir à quoique ce soit avec cet accoutrement absurde et ce nez rouge. Je ris. J'accueille tout. L'absurdité, la nullité, la grossièreté, les grimaces, le ridicule. C'est tout. Je me peinturlure une sorte de barbe noir et le reste en jaune. Je n'en finis pas de me décrocher la mâchoire.

Les clowns regagnent leurs chaises et, un à un vont passer sur le plateau, sour le regard des autres attentifs. Maëlle conduit la séance.

Improvisation

Accueillir ce qui vient. Rien d'autre. Pas de mise en scène élaborée, juste sentir ce qui vient et même pas l'idée de faire rire. Juste être, tel qu'on arrive, tel qu'on se porte, dans cet espace. C'est pas facile. évidemment...parce que le regard des autres... parce qu' on se sent être rien de représentatif quant à soi. Enfin, il n' y a plus de moi social ou de représentation de soi tel qu'on l'imagine. On n'imagine rien. Cet état de dépouille laisse pourtant transparaître tout; difficile de dire.

Je m'avance dans le fond du plateau avec quand même l'idée de réagir sur mon accoutrement singulier. Les premiers gestes vont vers cette manche unique qui garnit mon bras, je commence à jouer avec ça, Maëlle recadre l'action pour plus d'attention sur cette manche. Focaliser sont attention sur un détail, le clown sait faire ça, c'est un gamin de deux ans, le clown. Il va triper deux heures sur sa manche et en sortir un truc drôle, pathétique, émouvant, unique. Il va créer l'évènement avec un détail insignifiant, une poussière, d'un grincement de porte en faire une symphonie... moi j'aime bien le clown poétique.
Mais c'est pas celui-là qui sort aujourd' hui !
Je m'approche du miroir lentement, et redécrouvre peu à peu ma silhouette grimée, et dêvetue, ça me fait rire, beaucoup, puis je vois mon bidon qui est à nu. Re-éclatement de rire. Et dans ce bidon il y a ce trou bizarre: "Qu'est ce qu... qu'est-ce que c'est que ce truc ? qu'est ce que... " mon doigt s'enfonce dedans, je le triture dans tous les sens comme les gamins savent bien faire, sans inhibitions. Je rigole encore, regarde les autres tout en continuant de faire le tour de mon nombril, "Ah, ah, a quoi ça sert ce truc ? hein !?", je cherche... j'y mets un baton de maquillage qui ne tient pas. Concentré, je cherche à nouveau et là éclate en toute sincérité: "hein ! à quoi sert ce machin là ? à quoi ça sert ce petit trou du cul ?!!"et je le peinturlure tout autour comme un soleil - la cloche de Maëlle retentit, pour finir l'impro - Mon clown se marre encore: "bon, bah j'crois qu'on a fait l' tour !"

mmh...

Sortie de scène.

L'improvisation la plus puérile et déshinnibée, que je vivrais pendant cette semaine.
"Ejaculatoire" même, me dira Maëlle. Tin !

Et après ?


Par la suite, tout se cadenacera et il me faudra retrouver cette liberté totu en douceur, comme si cette première improvisation avait été "too much", trop et trop vite.
Je me suis demandé pourquoi avoir focalisé sur le nombril... tu m'étonnes. 
Et ces mots là, bigre ! 
T' étonnes pas.
Faut accepter ça.
Si je n'étais pas en clown, je courrai chez un psy, j'crois.
T'es pas en clown... 
j'suis pas en sucre, non plus, du con !

7 commentaires:

LE MAMI a dit…

"Sans blague";
H./S.

Astrid Shriqui Garain a dit…

« Notre nature originelle n'était pas ce qu'elle est aujourd'hui, loin de là. » ( Platon) ….
Ce nombril, ce sacré « panse- bête » !
Le nœud du problème fera toujours partie de l'Histoire ! T'as raison, faut en rire à s'en faire péter la panse ! Et jamais en pleurer comme des bêtes !! :)

alex-6 a dit…

c'est mieux de faire le clown que d'être un "pitre" dans la vie quotidienne ,c'est sans doute ce qu'auraitdit le psy

Laure K. a dit…

@H.S

bip: "Reggiani"

Laure K. a dit…

@Astrid

Tu m'étonnes, John !
:-)

Laure K. a dit…

@Alex

Je ne suis pas tout a fait en désaccord avec votre insulte, mais pas en accord non plus.
Et je ne payerais pas de consultations pour ce sujet.

Anonyme a dit…

Merci Laure, pour les traces écrites de cette belle aventure vécue ensemble ! Bises, Annie

Fabienne Verdier, rencontre

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